Marlène FOUCHEY, psychologue Meyzieu - Patrick DUMAS, psychiatre Meyzieu Cabinet NeuroPsy Meyzieu

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La personnalité paranoïaque

Par Le 14/06/2017

Le terme paranoïa est un mot grec signifiant folie, dérèglement de l’esprit.

Dans la psychiatrie allemande du XIXème siècle, le terme paranoïa englobait l’ensemble des délires. Il a vu son sens se préciser et son champ se limiter au XXème sous l’influence de Kraepelin.


Dans sa période pré-Kraepelinienne, Freud considérait la paranoïa comme une identité très large qui regroupait la plupart des formes de délires chroniques. A partir de 1911, il adopte la grande distinction de Kraepelin entre paranoïa et démence précoce. Freud ainsi que Kraepelin englobe sous le terme paranoïa l’ensemble des délires systématisés comme le délire de persécution mais également l’érotomanie, le délire de jalousie et le délire de grandeur.
 

Les critères du DSM IV

A. Méfiance soupçonneuse, envahissante envers les autres, dont les intentions sont interprétées de manière malveillante, qui apparait au début de l'âge adulte et est présente dans divers contextes, comme en témoignentt au moins 4 des 7 manifestations suivantes :

- le sujet s’attend sans raison suffisante à ce que les autres l’exploitent, lui nuisent ou le trompent.

- Il est préoccupé par des doutes injustifiés concernant la loyauté ou la fidélité de ses amis ou associés

- Le sujet est retissant à se confier à autrui car il craint de façon injustifiée que l’information soit utilisée de manière perfide contre lui

- Le sujet discerne des significations cachées, humiliantes ou menaçantes dans des commentaires ou des événements anodins

- Il garde rancune, c'est à dire qu'il ne pardonne pas d’être blessé, insulté ou dédaigné

- Il perçoit des attaques contre sa personne ou sa réputation auxquelles il va réagir par la contre attaque ou la colère

- Il met en doute de façon répétée et sans justification la fidélité de son conjoint ou de son partenaire sexuel

B. Ne survient pas exclusivement pendant l'évolution d'une schizophrénie, d'un trouble de l'humeur avec caractéristiques psychotiques ou d'un autre trouble psychotique et n'est pas dû aux effets psychologiques directs d'une affection médicale générale.
 

Données épidémiologiques

On estime ce trouble à 0,4 % à 3,3 % de la population. Il est deux fois plus fréquent chez l’homme que chez la femme. Il est plus fréquent chez les proches de patients schizophrènes.
 

Caractéristiques psychopathologiques

Le comportement majeur du paranoïaque est la défense avec promptitude à l’attaque, attitude qui est sous-tendue par un sentiment de méfiance qui se développe généralement dans tous les domaines de la vie du sujet. La personnalité paranoïaque va tout autant se méfier de celui qu’elle considère comme plus puissant qu’elle, qui le menace, que de celui qu’elle considère comme plus médiocre, plus petit et qu’elle méprise généralement. Il y a trois traits caractéristiques de la personnalité paranoïaque :

  • l’hypertrophie du Moi

Existence d’une surestimation de soi même qui s’exprime par un autoritarisme prononcé. Les sujets sont alors décrits comme égocentriques, orgueilleux, toujours sur de leur bon droit et de leur opinion qu’ils veulent imposer aux autres. Ils pensent posséder des talents inhabituels et être capables de grandes réalisations. En dépit de la modestie des résultats, ces personnes ne remettent pas en cause leurs potentialités irréalistes qu'elles estiments entravées par autrui. Ces individus sont décrits comme peu affectifs, ils mettent d’ailleurs eux mêmes un point d’honneur à se décrire comme objectifs, froids et rationnels.

L’hypertrophie du Moi est une attitude réactionnelle contre une constante mise en question, qui est interne et externe.

  • La fausseté du jugement

elle explique que l’on trouve souvent chez les paranoïaques une absence d’autocritique. leur raisonnement se veut être logique, mais leurs idées s’appuient en réalité sur des à priori subjectifs qui les conduisent à ne pas tenir compte du contexte général de la situation et des arguments d’autrui. les augments positifs ou négatifs avancés par les autres sont généralement rejetés ce qui conduit les psychopathologues à parler de psychorigidité de la pensée.

  • Méfiance et susceptibilité

la personnalité paranoïaque vit dans l’attente d’être trompée ce qui explique pourquoi elle se sent facilement dédaignée, rejetée, non évaluée à sa juste valeur et pourquoi elle se froisse rapidement (ce qui est le signe de sa grande susceptibilité).

Affirmation de soi, remise en question de l’intérieur, projection, méfiance et psychorigidité avec rétention des affects définissent la personnalité paranoïaque.
 

au sein des personnalités paranoïaques, on distingue ce que l'on appelle les personnalité de combat et les personnalités de souhait.

  • chez les personnalités de combat, l'aspect opiniâtre, fanatique et querelleur domine, la surestimation de soi et la méfiance étant des traits secondaires
  • chez les personnailtés paranoïaques de souhait, l'idéal et la réalité coïncident. Ce sont des originaux avec peu de contact avec le monde. Ils défendent un idéal mais sans que cela devienne une cause personnelle et sans se battre.
     

Relations interpersonnelles et expression affective

Les relations interpersonnelles sont très difficiles pour le patient et pour l’entourage étant données les caractéristiques de la personnalité paranoïaque. Les autres vont modifier leur comportement face au patient ; ils vont lui dire le moins de chose possible afin qu’il est moins d’élément à interpréter de manière malveillante. Cette attitude de protection ne va que renforcer la conviction du paranoïaque qu’on lui cache des choses, donc qu’on lui en veut. Exclu ou s’excluant, ils se retrouvent souvent isolés. Les conflits avec les autorités sont fréquents.

La méfiance et le soupçon amènent le paranoïaque à supposer qu’au delà de l’apparence première, il existe une autre réalité, menaçante, mauvaise, le conduisant à une investigation obstinée et pointilleuse. Le moindre détail suspect est grossi et généralisé (distorsion cognitive de la surgénéralisation et de l’abstraction sélective).

Le paranoïaque a des difficultés à gérer l’ambiguïté, qui est en fait à l’intérieur de lui même et qu’il projette à l’extérieur.

La personnalité paranoïaque cache ses réactions émotionnelles car elles sont pour elle le signe d’une faiblesse qui pourrait être utilisée contre elle. Elle va éviter toute situation qui l’amènerait à se trouver vers les autres et à leur faire confiance. Il cache ses émotions, ne se confie pas et ne se laisse pas aller. Il redoute l’expression affective, par conséquence la sexualité, l’amour et la création artistique.

Style cognitif

Il se caractérise par un état de vigilance extrême, tourné vers le dehors (le sujet va être à l’afus des informations). Ils sont décrits comme manquant d’introspection, c’est à dire une incapacité à se remettre en cause et à questionner leur propre fonctionnement.

Les schémas cognitifs qui gouvernent l’attitude paranoïaque sont de la forme :

- il faut être sur ses gardes

- on ne peut pas faire confiance aux gens

- je ne dois pas me laisser faire

- si les gens agissent de manière aimable, ils peuvent être en train de vous exploiter

- si on arrive à connaître des choses sur moi, on s’en servira contre moi

Il se génère un univers instable en perpétuelle recomposition, provoquant des remise en question constante de l’extérieur : « si les choses étaient autrement qu’elles paraissent. »
 

Adaptation et évolution

L’adaptation socioprofessionnelle peut être satisfaisante mais elle est régulièrement ponctuée de difficultés professionnelles qui concernent le plus souvent des conflits avec des collègues, et surtout avec les supérieurs hiérarchiques.

L’adaptation familiale pose régulièrement des problèmes étant donné le contexte d’autoritarisme, de méfiance et de susceptibilité.

Les deux plus fréquentes évolutions sont :

- la survenue d’un épisode dépressif majeur à forte connotation de persécution

- un délire chronique paranoïaque. Certains auteurs pensent que la personnalité paranoïaque constitue un facteur de prédisposition à la survenue d’un délire paranoïaque. En effet, selon certains auteurs, le personnalité paranoïaque représenterait un terrain sur lequel peut se développer le délire, mais toutes les personnalités paranoïaques ne sont pas amenées à délirer un jour.

La majorité des personnalités paranoïaques gardent cette personnalité.
 

Hypothèses explicatives

Hypothèse à orientation psychodynamique

Freud a travaillé sur la Paranoïa et a interprété le « caractère paranoïaque » comme un système de défense, comme une homosexualité latente. Il a interprété le sentiment de persécution comme des projections sur les autres de désirs inacceptables pour le Moi du sujet.

D’autres hypothèses mettent l’accent sur l’existence d’un traumatisme infantile qui aurait engendré pour le sujet une déception profonde quant à la réalité sociale et familiale. Durand leur enfance, ces individus auraient subi des carences affectives, des humiliations engendrant chez eux une forte culpabilité qu’ils vont avoir tendance à reporter vers l’extérieur. Cela expliquerait que la personnalité paranoïaque n’attend des autres que de l’agressivité et qu’elle se tienne en permanence sur ses gardes.

Selon Colby (1981), l’attitude paranoïaque serait destinée à éviter la honte et l’humiliation qui auraient été subies à une période précoce de l’existence. Dans le même axe, le modèle de Cameron (1974) postule que dans des circonstances de carence affective, d’humiliation, de mauvais traitements, le sujet a cessé de croire en l’amour. il n’attend plus des autres que de l’agressivité.

Une autre hypothèse psychodynamique met l’accent sur le rôle des parents. Le futur paranoïaque aurait été surinvesti par ses parents qui l’ont considéré comme un être exceptionnel. L’enfant aurait intégré cette vision ce qui l’a conduit à développer une attitude dominatrice engendrant des difficultés sociales et le rejet de la part des autres. Une identification massive à un père puissant peut jouer le même röle; à partir d'une telle vision de lui même, le sujet développe une attitude altière et dominatrice.

Des événements culturels et sociaux ont été mentionné pour erndre compte du développement de cette personnalité. On aurait plus de chance de développer une paranoïa dès lors que l’on appartient à une minorité (ethnique, sociale…).
 

Hypothèse biologique

La seule donnée concerne la parenté avec un parent schizophrène ou ayant des troubles dysthymiques. Il existe également une comorbidité fréquente avec les troubles paniques et l’alcoolisme.
 

Prise en charge

Ce sont des patients que l’on voit rarement en psychiatrie car ce trouble n’est pas très fréquent et que les patients ne pensent pas être malades. Ils sont donc rarement demandeurs de prise en charge.

Objectif thérapeutique

Il est indispensable d’apprendre à lutter contre ce sentiment d’insécurité permanent qui envahit la personne paranoïaque. Il faut lui apprendre à se mettre à la place des autres, éprouver de l’empathie et à interpréter moins négativement les comportements d’autrui, à ne pas systématiquement percevoir des intentions malveillantes dans le comportement des autres. Pour le sentiment d’infériorité sous-jacent, il peut être intéressant d’utiliser les mêmes techniques que pour lutter contre la dépression comme le tableau de Beck.
 

Sources

Vocabulaire de la psychanalyse. J. Laplanche; J.B. Pontalis

Les personnalités pathologiques - Approche cognitive et thérapeutique. Q. Debray. D.Nollet

Psychiatrie de l'enfant, de l'adolescent et de l'adulte. I. Gasman. J.F. Allilaire

Traité de psychiatrie. M. Gelder. R. Mayou. P. Cowen

Mini DSM-IV-TR. Critères diagnostiques

 

Marlène FOUCHEY, psychologue à Meyzieu, 69330 (agglomération Lyon)

Généralités sur les personnalités pathologiques

Par Le 14/06/2017

Quelques définitions de personnalité, caractère, tempérament avant d'aborder la personnalité pathologique

Définitions...

Avant d’aborder les personnalités pathologiques, il semble nécessaire de s’arrêter un temps sur la définition même de la personnalité. En effet, déjà pendant l’Antiquité, l’homme avait conscience qui était porteur de certaines régularités psychologiques. Leur description a varié selon les époques en s’attachant soit à l’intelligence, au physique, au comportement ou encore aux sentiments. Il existe un ensemble de termes variés qui définissent ses régularités psychologiques :

  • le caractère désigne les aspects invariants du comportement. Ce sont les manières, les façons de réagir, les attitudes qui sont propres à un individu et qui permettent de le distinguer des autres. Aujourd’hui , par extension, le caractère englobe également les régularités affectives et de l’humeur d’un sujet. Widlöcher et Basquin définissent le caractère comme « l’ensemble des traits gravés observables qui, chez un individu ou dans un groupe, définissent une manière habituelle de se comporter dans un certain type de situation ou vis-à-vis de certains objets ».
  • Le tempérament fait référence aux correspondances physiques du caractère. Galien au 2ème siècle décrivait quatre tempéraments : le sanguin, le colérique, le mélancolique et le lymphatique. Millon et Davis (1996) définissent le tempérament comme "la disposition constitutionnelle d'un individu par rapport à l'activité et l'émotivité".
  • La personnalité reste difficile à définir. En effet, ce terme a changé plusieurs fois de définition. Ce mot provient du latin "persona" qui désigne le masque de théâtre. C’est la façon dont on se montre, le personnage social que l’on réalise, l’apparence externe, tournée vers les autres. Sous l’influence du christianisme, la personnalité pris un sens inverse, tourné vers l’intérieur. il désigne dans ce cadre l’unicité de l’individu centré sur son âme. Enfin, avec l’avènement de la psychologie, la personnalité fut décrite comme la somme des différentes facultés d’un individu.

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La personnalité renvoit à un système stable et répétitif; Piaget parlait de programme d'éxistence pour désigner la personnalité. Elle désigne l'intégration stable et individualisée d'un ensemble d'émotions, de cognitions et de comportements. Elle correspond aux modes de réactions (à l'environnement) émotives, cognitives et comportementales qui caractérisent chaque individu.

  • Le terme type désigne un modèle ou une forme qui se reproduit de façon identique à plusieurs exemplaires.

  •  

Qu'est ce qu'une personnalité pathologique?

Les personnalités pathologiques regroupent des entités pathologiques stables et durables tout au long de la vie d’un individu. Elles sont habituellement repérables dès la fin de l’adolescence ( au début de l’âge adulte). Le diagnostic de trouble de la personnalité doit se faire généralement en dehors de la présence d’un trouble mental avéré qui peut transitoirement altérer le fonctionnement de la personne.

L'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) définit les troubles de la personnalité comme "des patterns comportementaux profondément implantés ou stables qui se manifestent comme des réponses rigides à une grande variété de situations sociales et personnelles. Ils représentent une déviation extrême ou importante par rapport à la manière dont l'individu moyen dans une culture donnée perçoit, pense, sent et, en particulier, établit des relations avec les autres. Un tel pattern comportemental tend à être stable et à inclure de nombreux domaines de fonctionnement comportemental et psychologique. Ils sont fréquemment, mais pas toujours, associés à des degrés divers de detresse subjective et à des problèmes dans le fonctionnement social."

41VDMEF8JGL__SY445_.jpgDans leur ouvrage "Comment gérer les personnalités difficiles", Lelord et André expliquent "Une personnalité devient difficile quand certains traits de son caractère sont trop marqués ou trop figés, inadaptés aux situations et qu'ils entrainent souffrance pour soi-même ou pour autrui (ou pour les deux). Cette souffrance est un bon critère pour porter le diagnostic de personnalité difficile".

L’épidémiologie des troubles de la personnalité a été très étudiée dans certaines personnalités pathologiques et très peu dans d’autres. on assiste souvent à une grande variabilité statistique qui est surtout due aux outils utilisés pour poser le diagnostic de personnalité pathologique. On estime à l’heure actuelle que les troubles de la personnalité touchent 2,7 % à 3,5 % de la population générale. On observe une augmentation de la prévalence de ces troubles dans des groupes pathologiques puisqu’on estime que, pour les déprimés, 33 % à 62 % d’entre eux présentent une personnalité pathologique ; ces estimations sont de 27 % à 56 % pour les patients anxieux.

 


 

Critères diagnostics du DSM pour les troubles de la personnalité

A. Les troubles de la personnalité constituent une modalité durable de l’expérience vécue et des conduites qui dévient notablement de ce qui est attendu dans la culture de l’individu. cette déviation doit se manifester dans au moins deux des quatre domaines suivant :

  • pla cognition : perception, vision de soi même, des autres et des événements
  • l’affectivité : la diversité, l’intensité, la labilité et l’adéquation des réponses émotionnelles
  • le fonctionnement interpersonnel
  • le contrôle des impulsions

B. ces modalités durables sont rigides et envahissent des situations personnelles et sociales très diverses.

C. Ce mode durable entraîne une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines importants.

D. Ce mode est stable et prolongé et ses premières manifestations sont décelables au plus tard à l’adolescence ou au début de l’âge adulte.

E. Ce tableau n’est pas mieux expliqué par les manifestations ou les conséquences d’un autre trouble mental.

F. Ce mode durable n’est pas dû aux effets physiologiques d’une substance ou d’une affection médicale générale (par exemple un traumatisme crânien).
 

Hypothèses explicatives

A l’heure actuelle, aucune hypothèse étiologique définitive ne peut être retenue pour expliquer l’apparition d’un trouble de la personnalité. Ce sont des traits de personnalité qui s’installent progressivement chez un individu tout au long de son développement et s’organisent en personnalité pathologique à la fin de l’adolescence ou au début de l’âge adulte.
 

Prises en charge

Etablir le diagnostic de trouble de la personnalité

Au cours des premiers entretiens, certains indices cliniques doivent faire penser que l'on est en présence d'un trouble de la personnalité à savoir:

  • le patient et/ou son entourage se plaignent de réactions comportementales chroniques, excessives, inadaptées à la situation
  • le patient a déjà essayé de nombreuses thérapies auparavant (généralement sans succès, elles seront d'ailleurs souvent critiquées par ce même patient)
  • le patient souffre d'un manque de références internes adaptées
  • le monitorage de soi est pauvre et médiocre
  • le monitorage des autres est déféctueux
  • la thérapie est caractérisée par des séries de crises
  • il existe une non compliance thérapeutique
  • les comportements sont rigides et compulsifs
  • le patient critique la thérapie, le fait de ne pas observer de changement
  • les croyances sont rigides et la perception des évènements est massivement baisée avec des difficultés à en avoir une autre lecture que la sienne propre
     
Durant la thérapie

Les prises en charge sont souvent délicates et les résultats peu spectaculaires. En effet, souvent, le sujet ne ressent pas immédiatement une souffrance et n’est donc pas motivé à consulter. C’est souvent à la demande de son entourage qu’il le fait. Le fonctionnement de la personnalité pathologique est souvent rigide et peu accessible aux modalités de prise en charge. Il n’y a pas de véritable symptôme sur lequel travailler. La thérapie doit viser à aménager les défenses de l’individu pour les rendre plus souples, moins rigides. Elle doit également travailler sur les différents modes relationnels que le sujet entretien avec les autres, et aussi aborder les représentations cognitives que le sujet possède, non seulement de son fonctionnement mais également de celui des autres. Dans certains cas, la thérapie doit permettre au sujet d’avoir plus d’autonomie, de confiance en lui même et de devenir moins dépendant d’autrui.

Au cours des différentes séances, on constatera:

  • une très grande difficulté chez le patient à rapporter ses sentiments et ses émotions
  • Les patients se montrent incapables de repérer les images mentales ou d'accéder aux pensées automatiques
  • Ils attribuent assez peu ce qui leur arrive comme un phénomène interne; la cause rapportée est généralement externe d'où des difficultés de remise en question
  • Difficultés à cibler une problématique. Le patient décrit de façon vague son problème, il parlera de malaise général.
  • Il peut y avoir une dépendance au thérapeute.
  • Le patient manifeste un sentiement d'impuissance avec l'impression que les choses ne peuvent pas changer.
  • Le noyau du problème est souvent centré sur les relations interpersonnelles
  • Le travail collaboratif est pratiquement impossible
  • Le patient aura une compréhension intellectuel du problème mais ses sentiments, ses croyances et ses comportements restent inchangés.
     

Les différentes personnalités pathologiques selon le DSM IV TR

Marlène FOUCHEY, psychologue à Meyzieu, 69330 (agglomération Lyon)

La personnalité vue à travers différents courants psychologiques

Par Le 14/06/2017

Nous aborderons diverses conceptions de la personnalité à travers la théorie psychanalytique, comportementaliste et ethnologiste.

1.La théorie psychanalytique
 

Il existe autant de définitions de la personnalité que de théories psychologiques. Cependant, elles ‘accordent toutes sur un certain nombre de notions mêmes si elles leur donnent des interprétations différentes.

D’une manière générale, il s’agit d’un concept global qui procède certain caractères de permanence. Elle évolue avec l’âge jusqu’à la fin de la vie. La personnalité se forge au fur et à mesure des évènements de vie rencontrés (elle est par là différente du tempérament). Elle correspond à l’organisation affective du sujet, l’affectivité déterminant le plus les actions.

Pour certain, la personnalité est structurée, organisée. Du point de vue structural, elle signifie que chacun a des éléments de personnalité qui ne prennent leur valeur que par rapport aux autres. Du point de vue associationniste, ces éléments sont juxtaposés les uns aux autres et restent relativement indépendants. La personnalité est dynamique : les éléments qui la constituent sont soumis à des forces dues à des stimulations d’origine interne et/ou externe. Ces éléments interagissent entre eux.
 

1.1.Structure de la personnalité
 

Freud a qualifié l’étude de la personnalité comme étant « structurale ». Il parle en termes de « topiques » (mot venant du latin « topos » qui signifie « lieu »). Il a proposé deux modèles de structure de la personnalité :

  • En 1900 : la première topique
  • En 1920 : la deuxième topique
     

Dans la première topique, Freud distingue dans la personnalité l’inconscient, le préconscient et le conscient. Dans la deuxième topique, il distingue trois instances : le ça, le moi et le surmoi.

Le ça constitue le réservoir des dispositions héréditaires et de l’énergie pulsionnelle. Le surmoi se constitue par l’intériorisation de tout ce que l’éducation apporte à l’enfant (les interdits, les valeurs morales et leur hiérarchie). Le moi est une instance médiatrice qui harmonise les influences opposées du ça et du surmoi et qui adapte la personnalité à la réalité extérieure.

Ces deux topiques sont complémentaires, l’une n’excluant pas l’autre.
 

1.2.Dynamique de la personnalité
 

Qu’il s’agisse de la première ou de la deuxième topique, les lieux psychiques qui constituent la personnalité ne sont pas juxtaposés et neutres les uns par rapport aux autres. Ils sont le siège de forces qui s’affrontent. Les instances s’opposent entre elles ce qui peut entrainer l’apparition de conflits psychiques. Ces fonctionnements en perpétuelles tensions représentent la dynamique de la personnalité.
 

1.3.Economie de la personnalité
 

Il existe des équilibres, des échanges, des augmentations, des circulations, des écoulements d’énergie quantifiables. Ce sont des mécanismes que Freud qualifie « d’économiques » ; par exemple, la femme enceinte à plus facilement accès à son inconscient parce qu’il y a une plus grande souplesse dans les mécanismes de défense.
 

1.4.Développement de la personnalité
 

Les développements de la structure et de la dynamique de la personnalité sont étudiés conjointement parce qu’ils sont liés. L’inconscient comporterait selon Freud un refoulé originaire, une sorte de contenu phylogénétiques acquis et qui s’enrichirait au fur et à mesure des expériences de l’enfant, des représentations fortement chargées en énergies pulsionnelles qui se « condensent » entre elles et qui, ensuite, attirent des représentations refoulées tout au long de la vie.

Selon Freud, les trois instances, le ça, le moi et le surmoi, existeraient dès l’origine. Le moi et surtout le surmoi ne se constituent et ne se différencient que progressivement en fonction de tout ce que l’enfant rencontre dans la réalité extérieure. Le développement de l’économie de la personnalité se fait selon une évolution appelée « libidinale » qui comporte des stades de développement de la personnalité.
 

1.5.Sexualité en psychanalyse
 

Ce terme n’a pas la même signification en psychanalyse que dans le vocabulaire collectif. En référence à Laplanche et Pontalis, la sexualité ne désigne pas seulement les activités et le plaisir qui dépend du fonctionnement de l’appareil génital, mais toute une série d’excitations et d’activités présentes dès l’enfance et qui procurent un plaisir irréductible par l’assouvissement d’un besoin physiologique fondamental (respiration, faim, fonction d’excrétion…).

Une pulsion désigne un processus dynamique qui consiste en une poussée qui fait tendre l’organisme vers un but. Selon Freud, une pulsion prend sa source dans une excitation corporelle créant un état de tension. Son but sera alors de supprimer cette tension, cette suppression faisant appel à un objet. La pulsion, pendant la constitution de l’objet libidinal, s’élabore en pulsions partielles ; elles fonctionnent dans un premier temps de manière indépendant puis elles tendent à s’unir dans les différentes organisations libidinales.
 

2.Les théories de l’apprentissage
 

Sous ce terme sont rassemblées des théories qui ont en commun :

  • De dire que le mécanisme essentiel du développement et du fonctionnement de la personnalité est la réaction à des stimulations
  • D’admettre une approche objective de la personnalité, c'est-à-dire l’étude de ses réactions observables en en prenant pas en compte l’étude du vécu du sujet

Ces théories renvoient à celles de Pavlov (la réflexologie), de Watson (béhaviorisme), à toutes les théories du conditionnement, comportementalistes.
 

L’apprentissage est défini comme la modification adaptative du comportement au cours d’épreuves répétées. Le terme « modification » implique le changement, « adaptative » implique un ajustement à l’environnement. Les épreuves répétées vont entretenir l’apprentissage et le conditionnement.

Dans ces théories, l’objet d’étude n’est pas les effets de l’apprentissage sur les idées, les sentiments, les émotions mais uniquement ses effets sur les modalités d’action observables.
 

2.1.Structure de la personnalité
 

La notion centrale des théories de l’apprentissage est que la personnalité est faite d’éléments simples, des stimulus-réponse qui sont associés. Pour exemple, Skinner a étudiée la relation existante entre stimulus et réponse ; Watson a étudié le stimulus et la réponse mais pas la relation qu’ils entretiennent. Ces deux éléments sont associés par simple contigüité ou par une relation hiérarchisée de façon plus ou moins complexe. Ils ont une certaine stabilité ce traduisant dans le comportement par des habitudes.
 

2.2.La dynamique de la personnalité
 

Les modèles du fonctionnement de la personnalité s’inspirent des lois de la physique et surtout de la mécanique avec des notions de continuité dans le temps et dans l’espace, avec l’idée de forces qui s’opposent et qui s’attirent.

Dans les théories de l’apprentissage, la dynamique de la personnalité est expliquée par un mécanisme unique qui est le conditionnement.
 

Lois communes à tous les conditionnements :

Il s’agit d’un mode de réaction stable. Certain ont tendance à disparaitre d’où la nécessité de renforcer les conditionnements avec :

  • Des renforcements positifs : les récompenses (les bon-points à l’école par exemple)
  • Des renforcements négatifs : les punitions

Les renforcements jouent un rôle dans l’entretien des conditionnements.
 

2.3.Economie de la personnalité
 

Ces conditionnements ne sont possibles que parce qu’il y a des êtres vivants qui cherchent le plaisir et cherchent à éviter le déplaisir. On retrouve ici le principe de plaisir de Freud. L’activité de tout être vivant n’est pas limitée à sa réaction face à un stimulus ; il y a en eux une force spontanée qui est le moteur du comportement. Les théoriciens de l’apprentissage utilisent le concept de « tendance » (tendance primaire de la soif par exemple) plutôt que celui d’énergie.
 

2.4.Développement de la personnalité
 

Les théories de l’apprentissage donnent une large place à l’apprentissage dans la mesure où elles interprètent la plupart des changements psychiques comme la conséquence de la mise en place d’un mécanisme de conditionnement. Ces théories sont utilisées pour expliquer la genèse des troubles mentaux et pour élaborer des modèles thérapeutiques (thérapies comportementales).
 

3.Les théories culturalistes
 

Les théories culturalistes adoptent un point de vue différent par rapport aux théories précédentes ; elles ne s’intéressent pas aux mécanismes généraux communs à tous les êtres vivants mais à ce qui peut entrainer des différences entre eux. Elles limitent leur étude à la culture et a son influence sur la personnalité.
 

3.1.L’ethnopsychiatrie
 

L’ethnopsychiatrie réserve une part égale à la dimension culturelle des désordres psychiques, de sa prise en compte et de l’analyse des fonctionnements psychiques.
 

3.2.L’ethnopsychiatrie d’inspiration psychanalytique : MORO
 

Moro a beaucoup travaillé avec des mères migrantes avec leur bébé. Sa théorie repose sur l’analyse de leur culture d’appartenance, sur leurs représentations culturelles.
 

Devereux (1930) fut le pionnier en France d’une psychiatrie métaculturelle fondée sur la culture en soi. Il postule l’universalité des lois du fonctionnement psychique tout en tenant compte de sa dimension culturelle, sans isoler un particularisme à chaque culture. Cette pratique s’inspire du modèle psychanalytique classique, de l’ethnologie, des sciences cognitives et systémiques.
 

Nathan en 1970 a mis l’accent sur les particularités culturelles de chaque ethnie. Il propose des cures directement inspirées des traditions, des croyances et des mythes.
 

Pour Moro et Nathan, le travail sur les mécanismes psychiques internes ne suffit pas pour instaurer des soins suffisants aux enfants ayant des parents immigrants. Il faut utiliser les ressources de leur culture d’origine et les importer dans leur culture d’accueil afin d’éviter tout risque d’acculturation. Le dispositif se présente sous la forme d’une réunion de plusieurs thérapeutes avec l’enfant et sa famille. La dynamique en jeu doit rétablir le patient dans sa culture pour le guérir.
 

Lebouici ne partage pas cette politique selon laquelle l’affiliation (l’appartenance culturelle) précède la filiation (l’appartenance familiale). Il s’oppose à cette proéminence accordée au système culturel au détriment de l’histoire personnelle.
 

3.3.L’anthropologie culturelle
 

Le culturalisme est également appelé anthropologie culturelle. Une étude sociologique américaine s’est attaché à décrire les cultures en les considérant chacune comme étant spécifique, non comparables les unes aux autres mais de même valeur. Elle vise à étudier l’impact de la culture sur les individus. L’emprunte commune à tous les membres d’un groupe est appelée « personnalité de base ». Kardiner l’a définie comme la personnalité type qui est rencontrée chez tous les membres d’un groupe et qui est la plus adaptée à une culture donnée. C’est une sorte « d’assise psychique » commune à tous sur laquelle se greffent les traits individuels. Il y a une influence de la culture sur le développement de la personnalité : elle impose une pression sur les individus en leur assurant une socialisation. Cela permet à l’individu de s’identifier aux autres membres du groupe et de se faire accepter par eux.
 

Cette approche culturaliste est très utilisée en psychopathologie. On l’appelle aussi psychiatrie culturelle ou transculturelle ; elle vise l’étude des différences entre les troubles mentaux selon les cultures.

 

Marlène FOUCHEY, psychologue à Meyzieu, 69330 (agglomération Lyon)

Les troubles de l'expression

Par Le 13/06/2017

Les troubles de l'expression concernent la tenue vestimentaire ainsi que la mimique et les expressions faciales.

La tenue vestimentaire
 

Certains patients portent des tenues vestimentaires étonnantes, surprenantes ou bizarres dans la mesure où elles contrastent avec leur âge, leur sexe ou leur statut social. Le relevé sémiologique concernant la tenue vestimentaire ne consiste en aucun cas à porter un jugement de valeur conformiste par rapport à la fantaisie vestimentaire de la mode. Les observations sémiologiques concernent les contrastes, les incohérences, les contradictions, les décalages importants et non les originalités esthétisantes et individualisantes.
 

La mimique et les expressions faciales
 

La mimique est l’ensemble des expression du visage et des expressions du regard. La mimique traduit l’état affectif dans lequel nous sommes. Elle vient appuyer les paroles et les pensées.
 

Les hypermimies
 

Il s’agit d’expressions faciales exagérées. Elles peuvent être généralisées ou polarisées.

Les hypermimies généralisées concernent tous les muscles de la face. Le regard est anormalement mobile, il ne fixe pas, est sans cesse aux aguets (exemple de l’expression d’euphorie chez le maniaque).

Les hypermimies polarisées expriment un seul thème affectif comme âpr exemple l’angoisse (exemple de l’expression de la passion chez le paranoïaque revendicateur).
 

Les hypomimies
 

Elles sont également appelées paucimimies, le préfixe pauci- signifiant peu nombreux. Elles sont caractérisées par la rareté du mouvement du visage et du regard.
 

Les amimies
 

Elles sont caractérisées par l’immobilité complète du visage. Le regard est fixe, vague, vide ou accaparé par un objet (exemple de l’expression de souffrance, de douleur morale et d’inhibition chez le mélancolique).
 

Les dysmimies
 

Une dysmimie signe une discordance, une dissonance, un hiatus, une contradiction, une fausse note entre l’expression faciale et affective. On parle de paramimies ou de mimiques discordantes lorsque l’expression physionomique est en contradiction avec l’expression verbal ou le vécu actuel du sujet.

On parle de mimique d’emprunt lorsqu’il y a la reproduction en miroir des mouvements de l’interlocuteur.
 

L’hypersyntonie
 

Le patient va être syntone à l’ambiance, il va coller à celle-là. Par exemple, s’il est en présence d’une personne qui pleure, il va pleurer également.
 

Les troubles psychomoteurs
 

L’agitation
 

L’agitation survient généralement par crises au cours desquelles l’implication psychologique et son corrélât moteur sont confondus dans des mouvements désordonnés qui s’expriment en actes agressifs, impulsifs, coléreux, menaçants ou spectaculaires. Dans l’hyperactivité, le comportement reste coordonné alors que dans la fureur, le sujet perd tout contrôle de lui même.

L’agitation prend des formes distinctes selon le contexte psychopathologique dans lequel elle s’exprime. elle peut être :

  • euphorique chez les sujets dont l’humeur est expansive, comme les maniaques par exemple
  • destructrice lors des conduites suicidaires ou des comportements d’automutilation
  • imprévisible, discordante dans certaines formes de schizophrénie
  • théâtrale, visant à lancer un appel au secours à l’entourage chez certains patients hystériques
  • anxieuse chez certains patients souffrants d’attaques de panique
     

L’impulsion et le raptus
 

L’impulsion désigne le besoin impérieux d’accomplir soudainement un geste ou un acte. Cette urgence à accomplir un acte échappe au contrôle volontaire de la personne. Les impulsions peuvent être :

  • des actes d’hétéro-agrassion ou d’auto-agression
  • des comportements inadaptés : fugues…
  • des satisfactions instinctives : conduites sexuelles compulsives, excès de boisson…

Les impulsions traduisent l’irruption de pulsions internes ou répondent à des exigences délirantes.

Les impulsions violentes immédiatement agis telles que le suicide, l’agression ou le meurtre sont appelées raptus.
 

Les parakinésies
 

Il s’agit de gestes automatiques, de mouvements répétés inlassablement et reproduits invariablement par le patient. Les plus fréquents sont les stéréotypies, comme par exemples celles de certains schizophrènes où de certains déments (grattage, balancement, rotation, contorsion répétitive de la main…).

Elles ne doivent pas être confondues avec les dyskinésies qui s’observent souvent en psychiatrie du fait de l’utilisation extensive des traitements neuroleptiques.
 

Les tics
 

Les tics sont des mouvements ou des vocalisations, soudains, rapides, involontaires, récurrents, brusques, stéréotypés, conscients, non rythmiques, sans but précis, qui viennent surcharger une motricité normale par ailleurs. Chez un même sujet, le tic dominant est généralement toujours le même, s’amplifiant avec l’anxiété, les émotions, diminuant dans les situations de détente et susceptible de déplacements topographiques avec le temps.

Lorsque le tics moteurs sont multiples est associés à des troubles du langage, ils constituent la maladie de Gilles de la Tourette. En 1885, Gilles de la Tourette la décrivit ainsi : « précipitation exagérée de mouvements et d’idées étranges : tics, grimaces, bruits, jurons, imitations et compulsions involontaires de toutes sortes, s’accompagnant d’un humour espiègle et d’une tendance à la bouffonnerie et aux incongruités. » elle peut être associée à une coprolalie (énoncé de mots grossiers), d’une écholalie (mimétisme verbal) et à une échomimie (mimétisme mimique et/ou gestuel).
 

La bradykinésie
 

La bradykinésie consiste en un ralentissement moteur, une baisse de l’activité. elle peut aller jusqu’à l’apragmatisme où le patient n’arrive plus à faire les gestes de la vie quotidienne (soins corporelles, repas…). Elle est généralement présente dans les états dépressifs.
 

La stupeur
 

La stupeur est un état de suspension de toute activité motrice : mimique, gestes, langage. Elle se traduit par l’immobilité, la sidération motrice. Elle s’accompagne souvent d’un mutisme, d’un refus de s’alimenter, d’un arrêt de toute activité, y compris de l’activité intellectuelle.
 

La catalepsie
 

La catalepsie est un trouble aigu du tonus et de l’initiative motrice. Il s’agit d’une conservation indéfinie des attitudes imposées passivement au malade, par perte momentanée de la contraction volontaire des muscles. Elle s’observe dans les états hypnotiques, dans la schizophrénie et dans certaines affections du système nerveux central.
 

Les troubles du langage
 

On distingue les troubles qui touchent la dynamique du discours de ceux touchant le contenu du discours.
 

La dynamique du discours
 

Ces troubles accompagnent les troubles de l’agitation ou du ralentissement décrits auparavant.

Dans le contexte d’une agitation psychomotrice, on retrouve une logorrhée verbale qui consiste en une accélération du débit verbal. Elle est caractérisée par une surabondance de paroles. Le discours est très difficile à suivre du fait de sa rapidité et de son manque d’organisation. cet état caractérise le discours du patient en phase maniaque.

A l’opposé, on parle de bradyphémie dans le contexte d’un ralentissement psychomoteur. Il s’agit d’un ralentissement du flux verbal d’un discours généralement monothématique. Elle caractérise le discours du patient déprimé.

D’autres troubles peuvent être relevés tels que :

  • l’écholalie : répétition en échos de mots ou de phrases venant d’être entendues par le patient. Elle ressemble à la façon de communiquer des autistes.
  • Les persévérations verbales : à différents moments du discours, le patient va répéter des mots, des phrases ou une partie de phrase qui appartient à un moment extérieur au dialogue
  • Le mutisme est l’absence totale de production langagière.
     

Le contenu du discours
 

Différents troubles peuvent être observés comme :

  • les néologismes : création d’un mot nouveau sans signification apparente par le patient pour son usage personnel. Le patient peut donner une signification à ce mot.
  • Les paralogismes : utilisation d’un mot connu dans un sens inhabituel.

Ces deux troubles sont présents massivement chez les patients schizophrènes. Le concept de schizophasie désigne le langage incompréhensible produit par un patient schizophrène.
 

Annexes

Marlène FOUCHEY, psychologue à Meyzieu, 69330 (agglomération Lyon)

Terminologie et sémiologie en psychopathologie

Par Le 13/06/2017

La psychopathologie, « science de la souffrance psychique » est l’étude des troubles psychiques : elle cherche à comprendre l’origine (étiologie) et les mécanismes de ces troubles.

Etudier des troubles psychopathologiques nécessitent de s’intéresser à la notion de normalité : qu’est ce qu’un comportement normal et qu’est ce qui est de l’autre de la psychopathologie ?

La normalité statistique se réfère à un pourcentage majoritaire de comportements par rapports à une moyenne statistique. La normale concerne la majorité des sujets d’une population donnée tandis que le pathologique renvoie aux extrémités et aux déviants par rapport à une moyenne. Actuellement, on n’oppose plus les « normaux » aux « malades mentaux ». la majorité des psychopathologues considèrent qu’il existe un continuum entre les différents modes de fonctionnement psychique. C’est dans ce contexte que Ganguilhem en 1966 propose la notion de normativité; un individu sain est celui qui peut tomber malade et se rétablir ; c’est un individu capable d’instaurer de nouvelles normes de fonctionnement dans des contextes différents. Ainsi, la santé mentale n’est plus définie par l’absence de maladie ou par un nombre réduit de symptômes, mais par des capacités de changement et d’adaptation à des situations nouvelles.

La sémiologie est l’observation minutieuse des signes et des symptômes d’un état pathologique. Un symptôme est défini dans le dictionnaire Le petit Robert comme « toute manifestation spontanée d’une maladie, qu’elle soit perçue subjectivement par la malade lui-même, comme une douleur ou un vertige (symptôme subjectif), ou qu’elle puisse être constatée par un observateur (symptôme objectif appelé couramment signe) ».on ne connaît pas vraiment en psychopathologie de symptôme « pathognomonique », c’est à dire de symptôme qui permet à lui seul de poser un diagnostic, qui serait spécifique d’une pathologie mentale particulière.

Le diagnostic est essentiellement une hypothèse. En aucun cas, le diagnostic n’est une affirmation définitive ou un étiquetage irréversible. Le diagnostic reste ouvert à la discussion, à la remise en question, voire au démenti.

L’analyse sémiologique constitue la première étape de la démarche diagnostique, étape au cours de laquelle, à partir de l’observation du patient, on va recenser les symptômes qu’il présente en tentant de les hiérarchiser en fonction de leur importance pour, dans un deuxième temps, les regrouper en syndrome. Un syndrome est un ensemble de signes, de symptômes, qui, d’apparence parfois disparate, forment une entité reconnaissable en raison soit de leur association constante, soit d’une cause toujours la même. L’analyse de ces éléments cliniques, au regard d’autres facteurs tels que le contexte d’apparition des troubles, la durée des symptômes, les antécédents éventuels du patient ou de sa famille, son âge, vont permettre d’évoquer des hypothèses psychopathologiques concernant le trouble mental supposé. La psychogenèse est cette phase qui consiste à chercher dans l’histoire personnelle du patient les éléments susceptibles de comprendre les difficultés psychiques actuelles du sujets.

 

Quelques définissions…
 

La prévalence concerne le nombre de personnes atteintes d’un trouble mental recencé au sein d’une population.

L’incidence consiste à comptabiliser le nombre de cas nouveaux sur une période donnée, le plus souvent sur un an.

Le sex-ratio est le rapport de la prévalence d’un trouble donné entre les hommes et les femmes.

L’âge typique de survenue des troubles est l’intervalle de temps pendant lequel on a le plus de chance qu’un type de trouble survienne.

Le mode d’apparition des troubles peut être brutal ou progressif.

 

Marlène FOUCHEY, psychologue à Meyzieu, 69330 (agglomération Lyon)

Les différents courants théoriques: quelques exemples

Par Le 13/06/2017

On définit la psychopathologie comme l’étude des troubles psychopathologiques qui se fait à l’aide de méthodes scientifiques. Il s’agit d’effectuer une approche scientifique d’un travail clinique. Cela implique pour le psychologue de se tenir informé des développements scientifiques les plus récents mais également actualiser ses méthodes d’investigation et de prise en charge des troubles mentaux. Par exemple, à partir des connaissances biologiques et neuropsychologiques recueillies sur les troubles de l’humeur, on ne pleut plus traiter la dépression à partir d’une seule approche psychologique d’orientation psychanalytique.



Le travail du clinicien est totalement modulé par le courant théorique qu’il utilise pour aborder les troubles mentaux. On fait le choix du courant selon sa croyance. La formation universitaire est un élément important dans le choix du courant ainsi que l’environnement scientifique du clinicien et de son parcours personnel. Ce choix est nécessaire afin d’avoir une démarche cohérente. Mais on peut s’informer des avancées des autres courants et juger de l’intérêt de ceux-ci.

Aujourd’hui, on tend à intégrer ces modèles entre eux. On considère que l’avenir du courant issu de la génétique ou celui issu des neurosciences n’est possible que s’il est en mesure de prendre en compte, dans son analyse, des facteurs d’origine psychologique et sociale comme étant des facteurs intervenant, et quelques fois affectant la neurotransmission ou l’expression génétique du comportement.

Le courant cognitiviste, en psychopathologie, intègre dans son analyse et dans son explication des troubles mentaux un organe censé être à l’origine du fonctionnement cognitif, le cerveau.
 

Le courant psychanalytique
 

C’est un modèle majeur des explications des troubles mentaux, le plus ancien modèle explicatif de la psychopathologie.

Il concerne essentiellement la théorie freudienne. Freud a développé un système de compréhension, d’explication et de prise en charge des troubles mentaux qui, à l’origine, s’adressait avant tout à des patients névrotiques. Ce modèle a été développé par ses successeurs (ex Lacan) à d’autres types de pathologies comme les troubles psychotiques.

La théorie élaborée par Freud repose sur l’élaboration d’une métapsychologie qui a pris deux formes :

  1. - la première topique : conscient, préconscient, inconscient
  2. - la deuxième topique : ça, moi, surmoi

L’explication des phénomènes psychopathologiques fournie par cette théorie repose sur l’interprétation d’évènements vécus pendant l’enfance. ces évènements peuvent ressurgir à d’autres périodes du développement sous des formes variées telles que les lapsus, les rêves, les actes manqués. D’autres manifestations sont les symptômes, ce à quoi va s’attacher le psychanalyste pour expliquer ces phénomènes concernant la dimension inconsciente, c’est à dire la signification cachée.

Cette manière de concevoir le psychisme humain et ses dysfonctionnements a conduit Freud a l’élaboration de la cure psychanalytique qui repose sur deux principes fondamentaux : la règle de la libre association et l’élaboration d’un transfert.

La cure psychanalytique a fait l’objet d’un certain nombre d’aménagement thérapeutiques afin que cette technique de prise en charge soit proposée à des patients autres que hystériques. En effet, au début de sa mise en place, la cure analytique était proposée uniquement à des personnes hystériques. Elle a été aménagée pour les psychotiques, les dépressifs, les patients ayant des troubles anxieux, pour qui la cure ne peut pas durer 10 ans. Ces techniques sont les thérapies d’inspiration psychanalytique. Les principaux aménagements ont été la suppression du divan, la situation de face à face, le thérapeute est plus intervenant (en effet, le silence peut angoisser certains patients).
 

Le courant cognitiviste
 

C’est un courant plus récent, qui se développe de plus en plus. Il a pris ses racines dans la théorie comportemental, béhavioriste (en référence aux travaux sur le conditionnement classique, de Pavlov et opérant, de Skinner). Il s’est développé dans les années 40, en psychopathologie, quand certains auteurs se sont rendus compte de l’insuffisance du modèle analytique. Ils se sont appuyés sur les travaux réalisés notamment par Pavlov pour expliquer les comportements anxieux (notamment phobiques). Ils s’appuient sur le modèle S → R, à savoir que le comportement pathologique ( R) est déclenché par un stimulus particulier (S).

Une évolution de ce modèle a eu lieu dans les années 60 aux états unis. En effet, on ne parle plus de modèle comportemental mais du niveau cognitivo-comportemental. Les cognitivistes ont ajouté un niveau d’analyse supplémentaire, celui de la cognition.

Cognition → Cerveau ↓ ↓ S → R

L’être humain est assimilé à un système de traitement de l’information.

De manière plus récente, l’étude de la cognition s’est enrichie des apports de la neuroscience en s’intéressant à l’organe qui sous tend les processus cognitifs, le cerveau.

Ce modèle cognitif de la psychopathologie a été élaboré pour la première fois par Beck. Concernant par exemple la dépression, dans ce modèle, on suppose que le patient déprimé présente des erreurs dans le traitement de l’information, erreurs qui entraient chez le patient une vision négative de lui même, du monde environnant et du futur.

Contrairement à l’approche psychanalytique, la thérapie comportementale a pour objectif d’éliminer d’emblée les symptômes présentés par le patient. Le thérapeute va agir à trois niveaux :

  • le comportement : le plus souvent, à l’aide des méthodes développées par le modèle comportemental (techniques basées sur l’apprentissage)
  • la modification de la pensée, du fonctionnement cognitif avec, pour objectif, d’apprendre au patient à construire des interprétations alternatives en références aux évènements qu’il vit.
  • Le niveau émotionnel en modifiant les deux paramètres ci-dessus, cela entraîne des modifications au niveau des émotions.
     

Le modèle familial, systémique
 

Ce modèle a une origine anglo-saxone. Dans les années 50, Bateson réalise des travaux sur l’analyse systémique des troubles schizophréniques. L’originalité de ce modèle concerne le niveau d’analyse auquel il s’intéresse. dans ce modèle, l’analyse de la pathologie ne se fait plus uniquement à partir de l’observation du patient (et, du fait de la description de ses symptômes) mais elle se fait aussi autour d’une modalité de communication et d’interaction qui structure la cellule familiale dans laquelle le patient évolue.

Ce modèle considère que le patient est victime d’un système familial qui est pathologique. Il met l’accent sur le rôle de l’environnement réduit à l’étude du système familial dans le développement des troubles mentaux. Dans ce modèle, le facteur clé du développement d’une pathologie est le système de communication, d’interaction entre les membres d’une même famille.

Les travaux réalisés par Baterson et ses successeurs (école de Palo-Alto) prennent appui sur la théorie de la communication dont les trois principes intéressants dans l’analyse des pathologies mentales sont :

  • - Prendre en compte la communication digitale et la communication analogique (communication verbale et non verbale)
  • - il est impossible de ne pas communiquer. Dans une situation de communication, même le silence a une valeur significative, interprétative pour l’interlocuteur. il est chargé d’un sens plus ou moins explicite dont l’interprétation va être laissée à celui à qui il s’adresse.
  • - la méta communication : il s’agit de la capacité de communiquer sur la communication. Elle va être plus souvent sollicitée dans des conditions particulières d’interaction où on va détecter une ambiguïté. Celle-ci est souvent relative à l’intention communicative du locuteur. On utilise cette capacité de méta communication quand on a des doutes sur ce que l’autre veut dire. C’est un concept important car selon Baterson, quand cette méta communication dysfonctionne, les patients n’ont pas la capacité de tenir un discours cohérent, logique voire compréhensible. Ce serait le cas des patients schizophrènes.

Ce modèle est à l’origine de la création des thérapies familiales. Elles ont comme particularités d’être des thérapies qui nécessitent l’intervention de la famille (au sens personnes vivant sous un même toit). Le modèle s’est élargi aux conduites addictives, des troubles des conduites alimentaires et leur prise en charge.
 

Le modèle neuropsychologique, neurobiologique
 

Ce modèle s’inscrit dans la tradition cognitiviste. Sa particularité est de s’intéresser au fonctionnement cérébral en lien avec la mise en place de processus cognitifs. On peut décrire deux tendances liées à l’élaboration de deux techniques d’investigation du fonctionnement cérébral :

  • la neuropsychologie comportementale
  • la neuropsychologie cognitive
     

La neuropsychologie comportementale
 

On va s’intéresser indirectement au fonctionnement du cerveau car on va inférer l’existence d’un éventuel dysfonctionnement cérébral à partir des seules performances cognitives du patient. On suppose que certaines épreuves vont étudier telle ou telle région cérébrale. Par exemple, on suppose que le test du Wisconsin met en jeu le cortex cérébral préfrontal. On analyse le fonctionnement cérébral à partir de l’analyse des réponses du sujet.
 

La neuropsychologie cognitive
 

Elle s’intéresse directement au cerveau en utilisant des techniques élaborées dans le champ des neurosciences : IRM, IRMf, TEP, PE… L’une des dernières démarches fut d’analyser la structure de cerveaux de patients porteurs d’une pathologie psychiatrique. Dans les années, 70, l’hypothèse qui dominait pour la schizophrénie était celle de lésions dans le cortex préfrontal. Elle fut vérifiée par les études post-mortem.

La démarche anatomique fut abandonnée au profit d’une démarche fonctionnelle où l’idée est d’étudier le fonctionnement du cerveau alors que le sujet est en train de réaliser un travail cognitif. Si on suppose par exemple une altération de la mémoire dans la dépression, on va, au cours d’une IRMf, demander à des sujets déprimés de réaliser une tache de mémoire. On va regarder quelles sont les zones cérébrales qui s’activent en réponse à la mise en place de certains processus cognitifs. Ces activations devraient être moins importantes chez des patients présentant des déficits mnésiques.

Les principales pathologies étudiées sous cet angle sont la schizophrénie, les pathologies dépressives, les troubles des conduites alimentaires et les troubles obsessionnels compulsifs. Des études récentes ont montré chez des patients présentant des troubles obsessionnels compulsifs une augmentation de l’activité cérébrale au niveau de certaines zones du cortex frontal. Il a été décrit chez des patients ayant subi une ablation d’une tumeur cérébrale localisée au niveau du cortex frontal l’apparition de TOC.

Ce modèle comporte cependant quelques limites :

  • il demande l’utilisation de techniques qui peuvent être invasives par rapport aux autres modèles
  • les techniques de prises en charge en lien avec ce modèle en sont au stade expérimental
  • enfin, par rapport aux études en imagerie, rien ne permet de dire que le dysfonctionnement cérébral observé est la cause du trouble psychologique. On pourrait très bien imaginer que, pour s’adapter aux symptômes, le cerveau verrait son activité cérébrale se modifier et non l’inverse (une modification cérébrale provoque l’apparition des symptômes).
     

Le modèle biologique
 

Ici, on va d’avantage s’intéresser au rôle des modifications de la transmission nerveuse au niveau des neuromédiateurs dans la survenue de pathologies mentales. A ce jour, les deux neurotransmetteurs qui ont fait l’objet de beaucoup de travaux sont la sérotonine et la dopamine. Ils sont largement cités dans la survenue de troubles de l’humeur, de la schizophrénie, de troubles obsessionnels compulsifs et des troubles des conduites alimentaires. Ce modèle s’est surtout développé à partir des années 50, à partir du moment où on a disposé de traitement médicamenteux avec des psychotropes. L’objectif de ce modèle est d’expliquer l’action de ces médicaments, en supposant que les symptômes des pathologies sont sous tendus par des dysfonctionnement d’origine biologique.
 

Le modèle génétique
 

Il s’appuie sur un constat en psychopathologie qui est que l’on observe souvent une constellation familiale des mêmes troubles ou des troubles apparentés.

En terme statistique, quand un individu est apparenté à un patient schizophrène ou déprimé, il a plus de risque qu’un sujet non apparenté de développer un trouble similaire ou très proche. Cette probabilité statistique est appelée en psychopathologie un taux de concordance. Il va être analyser à partir des constellations familiales, surtout à partir des études sur des jumeaux (monozygotes et hétérozygotes).

La question posée par ce modèle est de déterminer le poids de la transmission génétique et celui des facteurs environnementaux. Il faut en effet garder à l’esprit que deux individus apparentés sur le plan biologique partagent en plus de leur patrimoine génétique un patrimoine environnemental. Les expériences qui étudient le poids génétique concernent les jumeaux monozygotes (même patrimoine génétique) adoptés (environnement différent, mais là encore, on peut supposer que leur famille d’adoption ne sont pas choisies au hasard et qu’elles partagent certaines similarités comme le niveau de vie).

A l’heure actuelle, on ne connaît aucun trouble dont la cause serait purement génétique. On ne connaît aucun gène responsable d’un trouble mental particulier. Pour que l’origine d’un trouble mental soit considérée comme génétique, il faudrait un taux de concordance de 100% chez des jumeaux monozygotes, ce qui n’a pas été observé. Le seul résultat qui revient dans les études concerne l’augmentation du taux de concordance en fonction de la proximité du lien de parenté entretenu avec le patient atteint d’un trouble mental. Ces taux diffèrent selon la pathologie mise en cause. On a montré un taux de concordance plus élevé dans l’autisme (où on suppose l’implication de 4 ou 5 gènes particuliers) que dans les troubles de l’humeur par exemple.

Le modèle génétique actuel propose de travailler sur les interactions gènes – environnement. Plutôt que de penser que l’on hérite d’une pathologie mentale, les modèles génétiques supposent l’héritage d’une vulnérabilité qui, sous l’effet de certains événements, va pouvoir engendrer la survenue d’un trouble mental. Une pathologie va survenir qu’à condition que le sujet rencontre un événement stressant, révélateur de cette vulnérabilité. D’autres modèles toujours génétiques supposent qu’une dotation génétique particulière peut augmenter la probabilité qu’à un individu de rencontrer des événements stressants qui vont eux mêmes avoir comme effet de révéler cette vulnérabilité.

L’idée actuelle est de proposer une lecture intégrative des troubles mentaux qui prend appui sur les principaux modèles explicatifs et qui serait bio-psycho-sociale. Adopter une telle démarche, c’est se démarquer des modèles écologiques pour adopter une démarche étiopathologique (modèles qui ne s’intéressent pas au « pourquoi » des troubles mais au « comment ». l’objectif est de préciser les mécanismes qui seraient à l’origine du développement de symptômes chez un individu.

 

Marlène FOUCHEY, psychologue à Meyzieu, 69330 (agglomération Lyon)

Les différentes approches théoriques: quelques exemples

Par Le 07/03/2017

On définit la psychopathologie comme l’étude des troubles psychopathologiques qui se fait à l’aide de méthodes scientifiques. Il s’agit d’effectuer une approche scientifique d’un travail clinique. Cela implique pour le psychologue de se tenir informé des développements scientifiques les plus récents mais également actualiser ses méthodes d’investigation et de prise en charge des troubles mentaux. Par exemple, à partir des connaissances biologiques et neuropsychologiques recueillies sur les troubles de l’humeur, on ne pleut plus traiter la dépression à partir d’une seule approche psychologique d’orientation psychanalytique.



Le travail du clinicien est totalement modulé par le courant théorique qu’il utilise pour aborder les troubles mentaux. On fait le choix du courant selon sa croyance. La formation universitaire est un élément important dans le choix du courant ainsi que l’environnement scientifique du clinicien et de son parcours personnel. Ce choix est nécessaire afin d’avoir une démarche cohérente. Mais on peut s’informer des avancées des autres courants et juger de l’intérêt de ceux-ci.

Aujourd’hui, on tend à intégrer ces modèles entre eux. On considère que l’avenir du courant issu de la génétique ou celui issu des neurosciences n’est possible que s’il est en mesure de prendre en compte, dans son analyse, des facteurs d’origine psychologique et sociale comme étant des facteurs intervenant, et quelques fois affectant la neurotransmission ou l’expression génétique du comportement.

Le courant cognitiviste, en psychopathologie, intègre dans son analyse et dans son explication des troubles mentaux un organe censé être à l’origine du fonctionnement cognitif, le cerveau.
 

Le courant psychanalytique
 

C’est un modèle majeur des explications des troubles mentaux, le plus ancien modèle explicatif de la psychopathologie.

Il concerne essentiellement la théorie freudienne. Freud a développé un système de compréhension, d’explication et de prise en charge des troubles mentaux qui, à l’origine, s’adressait avant tout à des patients névrotiques. Ce modèle a été développé par ses successeurs (ex Lacan) à d’autres types de pathologies comme les troubles psychotiques.

La théorie élaborée par Freud repose sur l’élaboration d’une métapsychologie qui a pris deux formes :

  • la première topique : conscient, préconscient, inconscient
  • la deuxième topique : ça, moi, surmoi

L’explication des phénomènes psychopathologiques fournie par cette théorie repose sur l’interprétation d’évènements vécus pendant l’enfance. ces évènements peuvent ressurgir à d’autres périodes du développement sous des formes variées telles que les lapsus, les rêves, les actes manqués. D’autres manifestations sont les symptômes, ce à quoi va s’attacher le psychanalyste pour expliquer ces phénomènes concernant la dimension inconsciente, c’est à dire la signification cachée.

Cette manière de concevoir le psychisme humain et ses dysfonctionnements a conduit Freud a l’élaboration de la cure psychanalytique qui repose sur deux principes fondamentaux : la règle de la libre association et l’élaboration d’un transfert.

La cure psychanalytique a fait l’objet d’un certain nombre d’aménagement thérapeutiques afin que cette technique de prise en charge soit proposée à des patients autres que hystériques. En effet, au début de sa mise en place, la cure analytique était proposée uniquement à des personnes hystériques. Elle a été aménagée pour les psychotiques, les dépressifs, les patients ayant des troubles anxieux, pour qui la cure ne peut pas durer 10 ans. Ces techniques sont les thérapies d’inspiration psychanalytique. Les principaux aménagements ont été la suppression du divan, la situation de face à face, le thérapeute est plus intervenant (en effet, le silence peut angoisser certains patients).
 

Le courant cognitiviste
 

C’est un courant plus récent, qui se développe de plus en plus. Il a pris ses racines dans la théorie comportemental, béhavioriste (en référence aux travaux sur le conditionnement classique, de Pavlov et opérant, de Skinner). Il s’est développé dans les années 40, en psychopathologie, quand certains auteurs se sont rendus compte de l’insuffisance du modèle analytique. Ils se sont appuyés sur les travaux réalisés notamment par Pavlov pour expliquer les comportements anxieux (notamment phobiques). Ils s’appuient sur le modèle S → R, à savoir que le comportement pathologique ( R) est déclenché par un stimulus particulier (S).

Une évolution de ce modèle a eu lieu dans les années 60 aux états unis. En effet, on ne parle plus de modèle comportemental mais du niveau cognitivo-comportemental. Les cognitivistes ont ajouté un niveau d’analyse supplémentaire, celui de la cognition.

Cognition → Cerveau ↓ ↓ S → R

L’être humain est assimilé à un système de traitement de l’information.

De manière plus récente, l’étude de la cognition s’est enrichie des apports de la neuroscience en s’intéressant à l’organe qui sous tend les processus cognitifs, le cerveau.

Ce modèle cognitif de la psychopathologie a été élaboré pour la première fois par Beck. Concernant par exemple la dépression, dans ce modèle, on suppose que le patient déprimé présente des erreurs dans le traitement de l’information, erreurs qui entraient chez le patient une vision négative de lui même, du monde environnant et du futur.

Contrairement à l’approche psychanalytique, la thérapie comportementale a pour objectif d’éliminer d’emblée les symptômes présentés par le patient. Le thérapeute va agir à trois niveaux :

  • le comportement : le plus souvent, à l’aide des méthodes développées par le modèle comportemental (techniques basées sur l’apprentissage)
  • la modification de la pensée, du fonctionnement cognitif avec, pour objectif, d’apprendre au patient à construire des interprétations alternatives en références aux évènements qu’il vit.
  • Le niveau émotionnel en modifiant les deux paramètres ci-dessus, cela entraîne des modifications au niveau des émotions.
     

Le modèle familial, systémique
 

Ce modèle a une origine anglo-saxone. Dans les années 50, Bateson réalise des travaux sur l’analyse systémique des troubles schizophréniques. L’originalité de ce modèle concerne le niveau d’analyse auquel il s’intéresse. dans ce modèle, l’analyse de la pathologie ne se fait plus uniquement à partir de l’observation du patient (et, du fait de la description de ses symptômes) mais elle se fait aussi autour d’une modalité de communication et d’interaction qui structure la cellule familiale dans laquelle le patient évolue.

Ce modèle considère que le patient est victime d’un système familial qui est pathologique. Il met l’accent sur le rôle de l’environnement réduit à l’étude du système familial dans le développement des troubles mentaux. Dans ce modèle, le facteur clé du développement d’une pathologie est le système de communication, d’interaction entre les membres d’une même famille.

Les travaux réalisés par Baterson et ses successeurs (école de Palo-Alto) prennent appui sur la théorie de la communication dont les trois principes intéressants dans l’analyse des pathologies mentales sont :

  • Prendre en compte la communication digitale et la communication analogique (communication verbale et non verbale)
  • il est impossible de ne pas communiquer. Dans une situation de communication, même le silence a une valeur significative, interprétative pour l’interlocuteur. il est chargé d’un sens plus ou moins explicite dont l’interprétation va être laissée à celui à qui il s’adresse.
  • la méta communication : il s’agit de la capacité de communiquer sur la communication. Elle va être plus souvent sollicitée dans des conditions particulières d’interaction où on va détecter une ambiguïté. Celle-ci est souvent relative à l’intention communicative du locuteur. On utilise cette capacité de méta communication quand on a des doutes sur ce que l’autre veut dire. C’est un concept important car selon Baterson, quand cette méta communication dysfonctionne, les patients n’ont pas la capacité de tenir un discours cohérent, logique voire compréhensible. Ce serait le cas des patients schizophrènes.

Ce modèle est à l’origine de la création des thérapies familiales. Elles ont comme particularités d’être des thérapies qui nécessitent l’intervention de la famille (au sens personnes vivant sous un même toit). Le modèle s’est élargi aux conduites addictives, des troubles des conduites alimentaires et leur prise en charge.
 

Le modèle neuropsychologique, neurobiologique
 

Ce modèle s’inscrit dans la tradition cognitiviste. Sa particularité est de s’intéresser au fonctionnement cérébral en lien avec la mise en place de processus cognitifs. On peut décrire deux tendances liées à l’élaboration de deux techniques d’investigation du fonctionnement cérébral :

  • la neuropsychologie comportementale
  • la neuropsychologie cognitive

La neuropsychologie comportementale
 

On va s’intéresser indirectement au fonctionnement du cerveau car on va inférer l’existence d’un éventuel dysfonctionnement cérébral à partir des seules performances cognitives du patient. On suppose que certaines épreuves vont étudier telle ou telle région cérébrale. Par exemple, on suppose que le test du Wisconsin met en jeu le cortex cérébral préfrontal. On analyse le fonctionnement cérébral à partir de l’analyse des réponses du sujet.
 

La neuropsychologie cognitive
 

Elle s’intéresse directement au cerveau en utilisant des techniques élaborées dans le champ des neurosciences : IRM, IRMf, TEP, PE… L’une des dernières démarches fut d’analyser la structure de cerveaux de patients porteurs d’une pathologie psychiatrique. Dans les années, 70, l’hypothèse qui dominait pour la schizophrénie était celle de lésions dans le cortex préfrontal. Elle fut vérifiée par les études post-mortem.

La démarche anatomique fut abandonnée au profit d’une démarche fonctionnelle où l’idée est d’étudier le fonctionnement du cerveau alors que le sujet est en train de réaliser un travail cognitif. Si on suppose par exemple une altération de la mémoire dans la dépression, on va, au cours d’une IRMf, demander à des sujets déprimés de réaliser une tache de mémoire. On va regarder quelles sont les zones cérébrales qui s’activent en réponse à la mise en place de certains processus cognitifs. Ces activations devraient être moins importantes chez des patients présentant des déficits mnésiques.

Les principales pathologies étudiées sous cet angle sont la schizophrénie, les pathologies dépressives, les troubles des conduites alimentaires et les troubles obsessionnels compulsifs. Des études récentes ont montré chez des patients présentant des troubles obsessionnels compulsifs une augmentation de l’activité cérébrale au niveau de certaines zones du cortex frontal. Il a été décrit chez des patients ayant subi une ablation d’une tumeur cérébrale localisée au niveau du cortex frontal l’apparition de TOC.

Ce modèle comporte cependant quelques limites :

  • il demande l’utilisation de techniques qui peuvent être invasives par rapport aux autres modèles
  • les techniques de prises en charge en lien avec ce modèle en sont au stade expérimental
  • enfin, par rapport aux études en imagerie, rien ne permet de dire que le dysfonctionnement cérébral observé est la cause du trouble psychologique. On pourrait très bien imaginer que, pour s’adapter aux symptômes, le cerveau verrait son activité cérébrale se modifier et non l’inverse (une modification cérébrale provoque l’apparition des symptômes).
     

Le modèle biologique
 

Ici, on va d’avantage s’intéresser au rôle des modifications de la transmission nerveuse au niveau des neuromédiateurs dans la survenue de pathologies mentales. A ce jour, les deux neurotransmetteurs qui ont fait l’objet de beaucoup de travaux sont la sérotonine et la dopamine. Ils sont largement cités dans la survenue de troubles de l’humeur, de la schizophrénie, de troubles obsessionnels compulsifs et des troubles des conduites alimentaires. Ce modèle s’est surtout développé à partir des années 50, à partir du moment où on a disposé de traitement médicamenteux avec des psychotropes. L’objectif de ce modèle est d’expliquer l’action de ces médicaments, en supposant que les symptômes des pathologies sont sous tendus par des dysfonctionnement d’origine biologique.
 

Le modèle génétique
 

Il s’appuie sur un constat en psychopathologie qui est que l’on observe souvent une constellation familiale des mêmes troubles ou des troubles apparentés.

En terme statistique, quand un individu est apparenté à un patient schizophrène ou déprimé, il a plus de risque qu’un sujet non apparenté de développer un trouble similaire ou très proche. Cette probabilité statistique est appelée en psychopathologie un taux de concordance. Il va être analyser à partir des constellations familiales, surtout à partir des études sur des jumeaux (monozygotes et hétérozygotes).

La question posée par ce modèle est de déterminer le poids de la transmission génétique et celui des facteurs environnementaux. Il faut en effet garder à l’esprit que deux individus apparentés sur le plan biologique partagent en plus de leur patrimoine génétique un patrimoine environnemental. Les expériences qui étudient le poids génétique concernent les jumeaux monozygotes (même patrimoine génétique) adoptés (environnement différent, mais là encore, on peut supposer que leur famille d’adoption ne sont pas choisies au hasard et qu’elles partagent certaines similarités comme le niveau de vie).

A l’heure actuelle, on ne connaît aucun trouble dont la cause serait purement génétique. On ne connaît aucun gène responsable d’un trouble mental particulier. Pour que l’origine d’un trouble mental soit considérée comme génétique, il faudrait un taux de concordance de 100% chez des jumeaux monozygotes, ce qui n’a pas été observé. Le seul résultat qui revient dans les études concerne l’augmentation du taux de concordance en fonction de la proximité du lien de parenté entretenu avec le patient atteint d’un trouble mental. Ces taux diffèrent selon la pathologie mise en cause. On a montré un taux de concordance plus élevé dans l’autisme (où on suppose l’implication de 4 ou 5 gènes particuliers) que dans les troubles de l’humeur par exemple.

Le modèle génétique actuel propose de travailler sur les interactions gènes – environnement. Plutôt que de penser que l’on hérite d’une pathologie mentale, les modèles génétiques supposent l’héritage d’une vulnérabilité qui, sous l’effet de certains événements, va pouvoir engendrer la survenue d’un trouble mental. Une pathologie va survenir qu’à condition que le sujet rencontre un événement stressant, révélateur de cette vulnérabilité. D’autres modèles toujours génétiques supposent qu’une dotation génétique particulière peut augmenter la probabilité qu’à un individu de rencontrer des événements stressants qui vont eux mêmes avoir comme effet de révéler cette vulnérabilité.

L’idée actuelle est de proposer une lecture intégrative des troubles mentaux qui prend appui sur les principaux modèles explicatifs et qui serait bio-psycho-sociale. Adopter une telle démarche, c’est se démarquer des modèles écologiques pour adopter une démarche étiopathologique (modèles qui ne s’intéressent pas au « pourquoi » des troubles mais au « comment ». l’objectif est de préciser les mécanismes qui seraient à l’origine du développement de symptômes chez un individu.

 

Marlène FOUCHEY, psychologue à Meyzieu, 69330 (agglomération Lyon)

Normal vs Pathologique

Par Le 07/03/2017

La notion de normalité est dangereuse dans certaines circonstances et à certaines époques. Si la notion de normalité (du latin norma = équerne) n’est pas neutre et difficile à définir, elle est souvent associée aux représentations et à l’éthique d’une société. Il existe plusieurs conceptions de la normalité.

 

Définition de la normalité
 

La norme signifie le juste milieu, la moyenne, ce qui sert généralement de référence.

Les trois grands modèles de la normalité
 

La normalité statistique
 

La normalité statistique assimile la norme à la fréquence. Elle se réfère à un pourcentage majoritaire de comportements par rapport à une moyenne statistique. Dans cette optique, les individus dits normaux sont les individus moyens et sont considérés comme pathologiques les individus déviants de la norme ou de la moyenne. Ce qui est normal est alors ce qui s’observe le plus fréquemment. Pour exemple, les tests de Qi ont une moyenne arbitraire de 100, score qui représente une intelligence moyenne, normale.
 

Le caractère arbitraire de ce concept représente un obstacle en psychologie ; comment comprendre un phénomène psychologique qui, pour être normal, doit se situer au niveau d’une limite précise dans une distribution continue ? Il est difficile de trouver une moyenne précise aux phénomènes psychologiques. La fréquence d’un phénomène ne suffit pas à rendre compte dans plusieurs cas de la notion de normalité. En effet, des phénomènes peuvent être fréquents mais pathologiques. Enfin, la norme n’a un sens que par rapport à un contexte de référence.
 

La normalité idéale ou sociale
 

La normalité sociale fait référence aux règles éthiques, sociales et culturelles d’une société donnée. La normalité sociale assimile l’équilibre psychologique au conformisme social ou culturel. Elle désigne une perfection à laquelle l’idéal collectif aspire.
 

Il s’agit d’une notion insuffisante qui risque de faire considérer des attitudes passives de soumission silencieuse comme adaptées alors qu’elles peuvent cacher une véritable pathologie. Dans certaines conduites suicidaires, les jours précédents l’acte, le sujet peut être très calme, silencieux, donnant l’impression à l’entourage qu’il est tout à fait adapté. De même, dans le cas de la perversion, le sujet peut être tout à fait bien adapté socialement. A l’inverse, certains peuvent être marginaux sur le plan social mais tout à fait équilibré psychiquement.
 

Les normes sociales et culturelles ont influencées la nosographie psychiatrique comme l’illustre l’exemple de l’homosexualité. L’homosexualité a été considérée comme pathologique jusqu’en 1970. Aux Etats-Unis, il y a eu un mouvement de protestation des minorités sexuelles demandant une reconnaissance de leur singularité. On a alors distingué deux types d’homosexualité :

  • Une homosexualité ego syntonique (en accord avec soi) : forme d’homosexualité qui n’a pas d’aspect pathologique, qui est bien vécue par l’individu, sans signe de souffrance ou de culpabilité.
  • Une homosexualité égo dystonique (pas en accord avec soi) : elle n’est pas acceptée par l’individu. Les sujets ont des tendances homosexuelles mais accompagnées d’une grande culpabilité. Cette culpabilité les empêche d’avoir une vie sexuelle harmonieuse.

DEVEREUX a montré qu’il existait différentes acceptations de l’homosexualité selon les cultures. Par exemple, les indiens Mohave admettent l’homosexualité. Selon eux, l’homosexuel a reçu un message de la part d’un génie leur demandant de se « déguiser » en femme.
 

La normalité sociale demande de prendre en compte le point de vue de l’observateur. En tant que psychologue, il faut être conscient de ses références personnelles, des références liées au groupe auquel on appartient, à son milieu social et culturel. Comme tout observateur, nous intériorisons tout un système de normes ; on peut alors avoir des préjugés vis-à-vis de tout ce qui est différent. Des problèmes peuvent alors se poser lorsque l’on prend en charge des patients étrangers qui ont une façon différente de la notre de décrire leur trouble. Par exemple, un patient parlant de sorcellerie peut passer pour délirant alors qu’il s’inscrit simplement dans un référentiel culturel différent du référentiel occidental.
 

La normalité fonctionnelle
 

La normalité fonctionnelle correspond à l’état qui parait le plus approprié à un individu en fonction de ses caractéristiques psychologiques propres. Ainsi considérée, la normalité est identifiée par l’épanouissement psychologique et le fonctionnement optimal des diverses composantes de la personne.
 

En psychologie, on fait plutôt appel à une combinaison de ces critères pour analyser la normalité.
 

En 1966, CANGUILHEM proposa le concept de « normativité » selon lequel un individu sain est celui qui peut tomber malade et se rétablir ; c’est un individu capable d’instaurer de nouvelles normes de fonctionnement dans des contextes différents.

Cette ligne de réflexion conduit à définir la santé mentale non pas par l’absence de maladie ou par un nombre réduit de symptômes, mais par des capacités de changement et d’adaptation à des situations nouvelles.
 

Actuellement, on n’oppose plus les « normaux » aux « malades mentaux ». La majorité des psychopathologues considèrent qu’il existe un continuum entre les différents modes de fonctionnement psychique.
 

La normalité selon les modèles et les disciplines
 

La signification de la normalité peut être différente selon le modèle théorique auquel on se réfère. Les marges du normal et du pathologique peuvent se déplacer en fonction du modèle ou de la discipline.
 

Normalité en psychologie clinique
 

La psychologie clinique se réfère au fonctionnement propre d’un individu et non à un ensemble d’individus. Un état est considéré comme normal s’il est approprié à un individu donné avec ses caractéristiques et ses buts, la pathologie étant liée à une diminution des capacités d’adaptation et de création.
 

Normalité en psychanalyse
 

Selon le modèle psychanalytique, il y a une différence de nature entre l’expression d’un sujet sein et celle d’un patient névrosé. Par exemple, un sujet névrosé présentera des crises de larmes exagérées par rapport à un évènement donné comparativement à un sujet sein ; la différence est quantitative.

La réponse de type névrotique se traduit par une réaction excessive « c’est dans le plus que réside la névrose » selon FREUD. Pour KLEIN, le psychotique est en fusion totale avec sa mère, il n’a pas d’identité propre. Chez l’individu normal, le bébé est également fusionné avec sa mère ; c’est un stade par lequel tout le monde passe mais les psychotiques y resteraient bloqués.
 

Normalité et psychopathologie de l’enfant
 

Chez l’enfant, la notion de normalité est encore plus complexe à évaluer car on doit se référer à un niveau de développement tout en tenant compte des variations individuelles. Dans l’évaluation de la « normalité » d’une enfant, il faut tenir compte des stades de développement ; la présence d’un symptôme peut être problématique à un certain âge et tolérée à un autre. Par exemple, les angoisses nocturnes prendront différentes valeurs selon l’âge de l’enfant, le contexte d’apparition, la durée…

Les symptômes peuvent être différents selon le contexte familial, social, le niveau de maturation et la problématique de l’enfant. Il est donc important de tenir compte du système familial, culturel et social dans de lequel s’inscrit l’enfant.
 

Normalité et psychopathologie comportementale
 

Les théories béhavioristes n’évoquent pas de différence entre le normal et le pathologique. Selon cette théorie, il existe des comportements inadaptés qui sont dus à des défauts d’apprentissage.
 

Normalité et psychopathologie sociale et culturelle
 

L’antipsychiatrie (LAING, COOPER) des années 70 considérait le pathologique comme une aliénation de l’homme inscrit dans une société. Elle refuse la psychiatrisation des sujets, le pathologique se situant dans al société et non dans l’individu. Ainsi, pour comprendre une pathologie, il ne faut pas prendre en compte l’individu seul mais également sa famille et son environnement social.

Ce modèle donne naissance à l’idée selon laquelle l’institution psychiatrique a tendance à stigmatiser, aliéner les malades ; les empêchant de sortir, la structure ne fait qu’aggraver les malades.

La réhabilitation sociale consiste à ouvrir l’institution psychiatrique vers la société, par exemple en faisant créer aux malades des œuvres d’art afin de les exposer. Il en va de même pour les appartements thérapeutiques où le malade est inscrit dans la société tout en recevant régulièrement la visite du médecin psychiatre.
 

Souffrance et pathologie
 

La souffrance peut-elle être perçue comme le signe de la présence d’une pathologie ?

La souffrance du patient constitue un repère important en psychologie clinique dans la prise en charge de celui-ci.

Néanmoins, dans le cas de certaines pathologies comme la perversion, la souffrance du sujet n’est pas au premier plan, ne mobilisant pas chez eux une demande de prise en charge. Les pervers ne souffrent généralement pas, aucune culpabilité n’accompagne leurs actes. Ici, c’est l’apparition de culpabilité qui va représenter un signe positif pour la prise en charge.
 

Voir aussi :

Marlène FOUCHEY, psychologue à Meyzieu, 69330 (agglomération Lyon)